Site castral médiéval de Cleuville

 

Site castral médiéval de Cleuville

Un château attesté dès le XIème siècle. Vue nord. 2021.
Cleuville passe des Talbot aux Estouteville au milieu du XIII
ème siècle.

 

Le 10 août 1262, la chancellerie d’Henri III, qui se trouve en France pour traiter de la Gascogne, notifie de Saint-Germain-des-Prés que « Guillaume Talbot, père de Jeanne, femme de Robert d'Estouteville, un Normand, dont elle est l'héritière [de Guillaume], qui s'est rendu en Normandie avec l'autorisation du roi, était fidèle au roi le jour de sa mort »726. Jeanne Talbot meurt en 1274 : Robert fait en mai une donation à l'abbaye de Valmont pour, dit-il, « l'âme de mon épouse Jeanne défunte »727. Son union avec la fille de Guillaume Talbot728, un cadet, qui ne semble pas avoir de biens importants en Angleterre, fait entrer Cleuville dans le patrimoine des Estouteville. Les archives datent sans ambiguïté le rattachement du milieu du XIIIème siècle : avant, Cleuville est aux Talbot, après aux Estouteville729. Situé à 10 km au sud-est de Valmont, c'est aujourd'hui un village de moins de 200 habitants, mais à l'époque le siège d’une importante châtellenie, détenue au moins depuis le XIème siècle par la puissante famille Talbot, dont le membre le plus illustre est John, 7ème baron Talbot, comte de Shrewsbury730, « la terreur des Français » durant la guerre de Cent Ans aux dires de Shakespeare... Le baron de Cleuville a rang à l'échiquier de Normandie731 et, vers 1207, doit au roi un service de 3 chevaliers732. Héritage des temps anciens, les vassaux du ‘franc fieu de Tallebot’ ont de grands privilèges : ils sont exempts ‘de guet, de coustume, de fouage, et par tout le circuit des mettes de Normandie, villes, forests, travers et marches’733. Les vastes retranchements (environ 2 hectares) du château médiéval de Cleuville, attesté dès le XIème siècle, subsistent734, dont une imposante motte tronconique735 et des fossés encore partiellement en eau (mare).

(T. 1, p. 173-175)


726. CPR, 1266-1272, p. 728. Appendice pour l’année 1262.
727. HMEN, p. 103.
728. Au temps de l'archevêque de Rouen Robert Poulain (1208-1221), Guillaume Talbot présente à la cure d'Auzebosc (Seine-Maritime, a. Rouen, c. Yvetot), relevant de Cleuville : ‘Osebosc. Guillelmus Talebot, miles, patronus.’ Sous Eudes Rigaud (1248-1275), celui qui présente à Auzebosc est ‘domini Roberti de Estoutevilla, ratione uxoris suae’, pour sa femme. RHF-23, p. 283 D-E. — Sous l'archiépiscopat de Thibault d'Amiens (1222-1229), Guillaume Talbot présente à Auberville-la-Manuel (Seine-Maritime, a. Dieppe, c. Saint-Valery-en-Caux ; DT76-1, p. 23) ‘ratione Matillidis uxoris suae’, pour son épouse Mathilde. Au temps de Pierre de Collemedio (1236-1244) puis d'Eudes Rigaud, ‘dominae Mathildis Talebot’, ‘uxore dicti Guillelmi Talebot’, présente seule à Auberville. RHF-23, p. 290 J-291 A. On retrouve le plein haubert aux mains des Estouteville en 1311 (ch. 9). En 1503, ‘en la parroisse d'Auberville-la-Manuel, y a ung fief de haubert et haute justice nomme le fief d'Auberville’ (RFBC, p. 235).
729. Voir ce qu’en disent Robert d’Estaintot (RSDE, p. 443-448) et Jacques Le Maho (ASC, p. 37, 43-44,
51-54). Sur ce point clé, Gabriel de la Morandière, en suivant le père Anselme, se trompe lourdement.
730. CP-12 (1), p. 606-620. Shrewsbury, chef-lieu du Shropshire.
731. Note 552.
732. RHF-23, p. 708 E.
733. HGMH-4, additions, f° 17v et 18r. Lettres de 1456, 1501 et 1523. Mette, limite.
734. 49.7053° N, 0.6359° E. Lieu-dit les Hauts-de-Cleuville.
735. 25 m de diamètre au sommet. ASC, p. 112.

 
 

Site castral médiéval de Cleuville

Motte tronconique fossoyée.

 

Site castral médiéval de Cleuville

Fossé extérieur au nord-ouest.

 

Site castral médiéval de Cleuville

Levée de terre échancrée et mare à l'est.