Pierre tumulaire de Robert V d'E.-Valmont et Marguerite d'Hautot

 

Pierre tumulaire de Robert V d'Estouteville et Marguerite de Hotot (vers 1330)Pierre tumulaire de Robert V d'E.-Valmont et Marguerite d'Hautot

† 1334 et 1330. Abbaye de Valmont. 2015.

 
 

Lorsque Marguerite meurt en 1330, Robert entreprend de préparer leur sépulture commune à l’abbaye. Il fait graver leur effigie sur une grande dalle (2,76 x 1,45 m) de marbre noir de Tournai sculptée en creux. Des ornements, sans doute de métal (marques de fixations), de marbre blanc et de pierres colorées, aujourd'hui disparus, incrustaient les parties creuses. Le couple est figuré sous un riche dais architectural à colonnes et double arcade multilobée, dont les gâbles sont surmontés de quatre anges thuriféraires. Les époux ont les mains jointes en prière. Les visages ont disparu, mais on peut supposer que les yeux des défunts étaient ouverts, les montrant prêts à affronter sereinement la mort, conformément aux conventions de représentation de l’époque. Comme sa belle-sœur Jeanne d’Estouteville à l’Île-Dieu, Marguerite porte voile, guimpe et un long manteau qui tombe en plis. Robert est entièrement revêtu d'une cotte de mailles, dont les gantelets pendent à ses poignets, sous un tabar non armorié. Un ceinturon soutient épée et écu à son blason, répété aux épaules sur deux ailettes rectangulaires : burelé de 14 pièces au lion rampant. Ses pieds, éperons aux chevilles, reposent sur un lion courageux, tandis que deux chiens jouent avec un os sous l’effigie de Marguerite, vivante évocation tant du foyer domestique que de la chasse947. Depuis le XIIIème siècle, l’art mortuaire tend au portrait, à la représentation des vivants au lieu des morts, revendiquant une certaine douceur de vivre, avant les désillusions de la guerre de Cent Ans. On lit distinctement les épitaphes marginales gravées en relief :

Le veuf fait laisser vierge un tiers de la bordure949, en prévision de sa propre épitaphe...

[...]

Translations
La tombe se situait à l’origine dans le sanctuaire, devant le maître-autel. Suivant les volontés de Robert, lors des grandes fêtes du calendrier chrétien, quatre grosses ‘torches de chire’, chacune d’un poids de 5 livres, brûlaient aux quatre angles de la sépulture, ‘du commencement de la grant messe iusques a la fin des iours qui ensuiuent’
955. La dalle funéraire est déplacée dans la chapelle latérale Saint-Nicolas en 1772, accompagnant le cénotaphe de Nicolas et le monument de Jacques et de sa femme Louise d’Albret, tandis que les restes des corps sont ensevelis dans un caveau sous le chœur. Puis, vers 1832, elle prend place au centre de la chapelle d’abside, où elle demeure jusqu'aux reconstructions des années 1990956. Elle est aujourd'hui installée dans le collatéral, à droite de l’entrée de l’abbatiale.

(T. 1, p. 217-218, 221)


947. Les femmes sont couramment représentées sur leur sceau avec un oiseau de proie. Un livre d’heures anglais du second quart du XIVème siècle présente des scènes de femmes pratiquant toutes sortes de chasses, avec ou sans chien. BL, ms Yates Thompson 13.
948. Fête des Morts, 1
er novembre 1330. Date aussi donnée par la Neustria pia, sans doute d’après l’inscription de la tombe.
949.
La pierre y est brute, uniforme, sans trace de dégradation volontaire.
[...]
955. HGMH-4, additions, f° 23v.
956. Détails des translations et références au
ch. 4.

 
 

Pierre tumulaire de Robert V d'E.-Valmont et Marguerite d'Hautot

Angelots maniant l'encensoir.

 

Pierre tumulaire de Robert V d'E.-Valmont et Marguerite d'Hautot

Ailettes armoriées de Robert.

 

Pierre tumulaire de Robert V d'E.-Valmont et Marguerite d'Hautot

Les chiens de Marguerite d'Hautot.

 

Miniatures de femmes chassant au XIVème siècle

Miniatures de femme chassant au temps de Marguerite d'Hautot.
British Library.