Motte castrale de Rocquefort

 

Motte castrale de Rocquefort

Sur son éperon rocheux, dominant les vallons d'Envronville dont on distingue les versants à l'arrière-plan. 2022.
Nicolas d'Estouteville fils, marié à Édive de Gournay, tient du duc un plein fief à Rocquefort et Envronville.

 

Nicolas tient du duc-roi un fief entier à Rocquefort et Envronville contigus, confisqué vers 1206382. Il n’a qu’une partie de Rocquefort, car les seigneurs du lieu sont signalés au temps de Robert Poulain (1208-1221)383, alors que sous l’archevêque Maurice (1231-1235), le patronat de l’église relève alternativement du roi et de la « dame de Rocquefort »384, le terme dévolu à la couronne pouvant correspondre à la portion confisquée. La manière dont ce fief direct arrive dans les mains de Nicolas n’est pas connue : son père n’en était pas le tenant en 1172385. L’église paroissiale est dédiée à la Vierge, mais Jacques Le Maho signale une dédicace secondaire à saint Hildevert386, dont le culte en Pays de Caux se diffusa de façon restreinte à partir Gournay-en-Bray, après qu’un sire de Gournay a fait transférer ses restes en son château pour y fonder une collégiale387. Les transferts de reliques sont, comme il le rappelle, traditionnellement une occasion de les fragmenter et d’en répandre le culte ; en premier lieu, concernant Hildevert, dans les églises relevant des Gournay. Rocquefort-Envronville, situé dans une zone d’influence identifiée de cette maison388, pourrait donc, comme Kimberley, avoir été détaché de l’honneur de Gournay pour le mariage d’Édive. Une motte féodale fossoyée subsiste au sud-ouest de Rocquefort389, en retrait du village, côté Envronville, sur le rebord du plateau de Bimorel dominant une enfilade de vallons.

(T. 1, p. 103-105)


382. RHF-23, p. 642 H. Vers 1210, ‘Nicholaus de Estoutevilla, unum feodum, de ducatu, in manu domini regis est, apud Roquefort et apud Evunvillam ; set nunquam pagavit auxilium.’ Nicolas, qui soutient Philippe Auguste en 1204, conserve logiquement ses terres normandes à cette date, mais son fils homonyme, qui lui succède vers 1206, se rallie ensuite à l’Angleterre (ci-après). Evunvillam, c’est Envronville (DT76-1, p. 334-335). Gabriel de la Morandière identifie Rocquefort à un lieu-dit « près Valmont » (HMEN, p. 82), sans tenir compte de la précision apportée par la mention d’Envronville. Il place curieusement ses guillemets. Dans le Livre des fiefs qu’il dit citer, ou Registres de Philippe Auguste (extrait ci-dessus), il n’est nullement écrit : « un fief à Roquefort, près Valmont »...
383. RHF-23, p. 294 L-295 A. Les héritiers présentent à Héricourt[-en-Caux], limitophe de Rocquefort et en relevant pour la portion Saint-Denis. 'Ecclesiae de Herecort heredes de Rocefort patroni' ; 'Robertus, presbiter, praesentatus a domina de Roquefort, receptus ab archiepiscopo Roberto'. Les seigneurs de Rocquefort sont attestés depuis 1126 (ASC, p. 45-46, 52).
384. RHF-23, p. 282 D. ‘Roquefort. Rex et domina de Roquefort, patroni alternatim.’
385. Selon le registre normand de 1172, l’unique seigneurie de Nicolas père relevant directement du duc-roi était celle des Loges. Note 301.
386. ASC, p. 52. ‘Cette seconde dédicace pourrait être celle de la chapelle castrale, qui aurait été réunie à l'église paroissiale après la ruine du château’.
387. GURNEY, op. cit., p. 8-9. Vincent TABBAGH, Base des collégiales séculières de France consultée en 2021. Les dates de l’installation des reliques et de la dédicace à Hildevert sont incertaines.
388. ASC, p. 52-53.
389. 49.6657° N, 0.6871° E.

 
 

Statue saint Hidevert (XVème-XVIème s.) dans la collégiale de Gournay-en-Bray..

Statue de saint Hildevert (XV
ème-XVIème s.) dans la collégiale de Gournay-en-Bray. 2021.